Les dangers des sites de rencontre

Publié le par pikkendorff


Si on en croit la rumeur publique, ces sites seraient hantés principalement de femmes vénales, de satyres, de dévoyés sexuels, d’organisateurs de la traite des blanches et la rumeur laisse entendre que les disparitions ne seraient pas rares…

Ce genre de propos est le plus souvent tenu par des gens qui ne se sont jamais connectés à Internet mais qui savent tout cela de sources sûre…

Le phénomène n’est pas nouveau et n’a pas attendu Internet pour naître, vivre et se développer.  Il a même été étudié par un sociologue. Ainsi, dans les années 60, une rumeur s’était abattu sur la ville d’Orléans, prétendant que de jeunes femmes disparaissaient des cabines d’essayage dans les magasins de mode et que certaines auraient fait l’objet de crimes rituels perpétrés par la communauté juive de la ville. Bien sûr, l’enquête a prouvé que cette rumeur n’avait aucun fondement. Mais il n’en demeure pas moins que, de bonne foi, des quantités de gens l’ont colportée, persuadés de la véracité des faits. Le sociologue Edgar Morin a publié dans son livre « la rumeur d’Orléans » en 1969 sa tentative d’explication du phénomène.

Cela étant, ne faisons pas d’angélisme : On rencontre sur ces sites des gens de moralité douteuse, des pervers, des désaxés comme on en rencontre dans tous les domaines de la vie dite réelle ! Et un minimum de prudence et de jugement s’impose lors d’une nouvelle prise de contact et ce, quelles que soient les circonstances de la rencontre.

Mais par delà les dangers inhérents à toutes nouvelles entrées en relation, il y a des écueils qui sont très particuliers à Internet. Mais le danger dans la plupart des cas n’est pas « l’autre » mais se trouve bel et bien dans soi même…
 
Nous allons tenter de les décrire… Mais auparavant, il importe de faire un sort à une autre de ces idées reçues ; on ne trouverait sur les sites de rencontres que des gens tordus, névrosés, en pleine dépression…  Sous-entendu pour la personne qui vous dit cela : tout le monde est ainsi, sauf moi, naturellement !

Il est plus probable que, le plus souvent, ces sites rassemblent en effet des éclopés de la vie, des anciens combattants de la guerre conjugale avec leur cortège de séquelles ou de blessures plus ou moins cicatrisées. Mais ne nous y trompons pas : cela vaut aussi pour vous et moi qui nous sommes à notre tour inscrits sur ces sites… Il faut bien se mettre en tête que nous ne venons pas sur ces sites, du moins de façon active, lorsque la vie nous comble et que nous nageons dans le bonheur d’une idylle sans nuage… Persuadons-nous que nous sommes tous, ou presque, affublés de « passés tous cabossés » ainsi que le chante Francis Cabrel. Presque, car je fais une exception pour les tous jeunes gens qui, au sortir de l’adolescence, utilisent ce moyen moderne pour découvrir la vie…

Premier danger : les dragueurs invétérés.

C’est une race qui n’est pas propre à Internet : ils hantent les boites de nuit, les bureaux, les rayons des super marchés… Ils sont en quête d’aventures sans lendemain, d’une partie de jambes en l’air dans laquelle on ne mise ni son cœur ni son âme et, bien que l’espéce soit plutôt masculine, on en trouve aussi des représentants femelles… Certains avancent à visage découvert et annoncent clairement leurs intentions. C’est tout à leur honneur et il n’est pas question de porter un jugement moral sur leurs agissements : cela ne regarde que leur conscience, leur éventuel conjoint et leurs partenaires occasionnels. Mais le plus souvent, cette stratégie ne se trouve pas très payante… Le poids des conventions sociales provoque un réflexe de rejet… Alors, ils avancent masqués, parlent d’amour sans en parler, se montrent très énigmatiques… et escomptent bien que la crédulité féminine leur permettra d'arriver à leurs fins. Car l’espèce des prédateurs sexuels est plus typiquement  masculine… Bien des femmes arrivant sur ces sites pensent que c’est le comportement caractéristique de tous le males présents… C’est sans doute faux : Ils ne sont peut-être qu’une minorité (quinze ? vingt pour cents ?) mais une minorité hyperactive, se manifestant auprès de tout ce qui bouge, guettant toute nouvelle venue pour se positionner par priorité… A coté de cela, il y a sans doute plein de braves hommes, très sincères dans leur recherche, mais un peu timides dans leur prise de contact et qui ont donc une attitude plus passive laissant le champ libre aux prédateurs…

Pourquoi donc bien des femmes gardent un sentiment amer de ces premières rencontres faites sur Internet ? Parce qu’elles ont le sentiment d’avoir été flouées… Le prédateur est près à toutes les concessions pour obtenir un rendez-vous : là, il se retrouve sur son terrain, celui de la drague traditionnelle. Pour lui, la fin justifie les moyens et commence le jeu de la séduction réciproque. Pourtant, dès la rencontre, la plupart des femmes comprennent à qui elles ont à faire mais assez souvent elles se laissent tout de même abuser par le personnage. C’est qu’elles ont du mal à admettre que la séduction déployée par elle l’a été en pure perte, C’est aussi qu’elles pensent qu’elles sont capables de faire changer l’individu de comportement… Sans doute n’est-ce pas propre à Internet mais il est vrai que la période qui précède la rencontre effective laisse la place pour le rêve, pour l’imagination et qu’il faut du temps pour comprendre que le personnage qui est devant nous est très différent de celui qui avait été imaginé….



Deuxième danger : l’illusion de l’intimité.

Une des caractéristiques des sites de rencontre : on y tombe très vite amoureux et les idylles naissent et meurent dans un  temps record, souvent entre un et trois mois. Le premier réflexe consiste à rejeter la faute sur l’autre qui n’était pas vraiment près à s’engager…

En fait, la question est bien plus complexe. Si on peut aisément comprendre que l’on se ravise lors de la rencontre, lorsque les faits sont bien présents, on peut s’étonner que les cœurs s’enflamment aussi vite… Certes, on peut se dire que les protagonistes sont dans un tel besoin affectif que les conditions sont d’avance réunies… pourtant, le plus souvent, rien de tel dans la vie de tous les jours… les sentiments ont plus de mal à poindre et à se développer. Il est probable que cela provient d’une intimité bien plus grande existant sur Internet qu’auprès des gens en chair et en os que nous côtoyons tous les jours… on se livre plus complètement, avec moins de retenue à un étranger que l’on ne connaît pas et qui, surtout, est totalement coupé de notre milieu de vie. Nous pouvons lui confier toutes choses sans crainte d’une indiscrétion, dévoiler des pensées intimes sans crainte du ridicule ; un cadre hiérarchique peut évoquer ses faiblesses sans redouter que cela ne parvienne aux oreilles de ses subordonnés, une mère de famille parler de ses manques sentimentaux sans avoir peur d’être jugée par ses enfants… Tout cela fait du correspondant inconnu le dépositaire de secrets, de pensées très personnelles qu’il est le seul à pouvoir entendre et ce, d’autant plus que souvent, le passé tout cabossé isole l’individu qui ne peut parler à cœur ouvert à personne parmi ses proches. En plus, cet inconnu a lui aussi, le plus souvent, vécu un  drame personnel qui l’aide à comprendre à demi-mot les soucis évoqués… Il en résulte une singulière complicité… Mais ce n’est pas tout… passés les premiers échanges de messages sur le site de rencontre, le plus souvent  les conversations se font par messagerie instantanée. Et compte tenu  des contraintes de ce mode de communication, se sont des heures passées quotidiennement pour échanger des idées. De plus, les formulations forcément brèves inhérentes à ces messageries obligent à être très attentifs à l’autre, à chercher à deviner autant que l’on lit. Tout ce temps passé, toute cette concentration, toute cette complicité partagée font que très vite, celui qui n ‘est encore qu’un inconnu prend une place disproportionnée dans un monde de solitude affective. La quête de chaleur humaine, le besoin d’exister en tant qu’homme ou femme, le jeu de la séduction qui préside, quoiqu’on en pense, à toute confrontation homme femme font le reste…
L’imagination prend vite le relais et, comme Nerval au Luxembourg, on en vient vite à penser :
« C’est peut-être la seule au monde
Dont le cœur au mien répondrait
Qui venant dans ma nuit profonde
D’un seul regard l’éclairerait »


Mais ce n’est là que rêves,  bien des sujets n’ayant pas été même effleurés avant que les mots d’amour ne soient échangés… Ces sujets attendent leur heure, celle de la confrontation, celle des réalités. Pourtant, le plus souvent, ce n’est pas délibérément que les choses n’ont pas été dites : c’est ainsi, ce n’est pas venu dans la conversation. Ou, si cela a été évoqué, cela n’a pas été approfondi…

Le danger est tout de même très relatif : souvent, ces feux de paille de l’amour restent tout de même de très belles histoires et ils sont peut-être nécessaires, au lendemain d’une longue et désespérée traversée du désert de la solitude sentimentale ou au sortir d’une pénible et tumultueuse aventure conjugale pour reprendre pied avec la réalité, pour se prouver que l’on peut encore aimer et être aimés…

D’autres dangers guettent l’internaute en mal de rencontre : ils feront l’objet d’un autre article prochainement…




Publié dans Sites de rencontre

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article